Par Eric NGABA
Bangui 2 juin 2017 (www.ndjonisango.net): Sans être parti pris dans cette affaire d’un supposé cout d’Etat annoncé par le pouvoir de Bangui, la rédaction de Ndjoni Sango qui a reçu l’élément sonore de cet entretien entre Anicet Georges Dologuélé et Joachim Kokaté, remis à la presse par Didacien Kossimatch, Porte-parole du Comité de soutien au Président Faustin Archange Touadera, met à la disposition de l’opinion nationale et internationale l’intégralité de cet entretien pour que la lumière soit faite. Pour mémoire et afin que nul n’en ignore, voici l’intégralité des 23 minutes d’entretien entre Anicet Georges Dologuélé et Joachim Kokaté à propos du supposé coup d’Etat en gestation en Centrafrique.
« Anicet Georges Dologuélé (AGD): Monsieur le ministre, comment ça va?
Joachim Kokaté (JK): Monsieur le Premier ministre, ça va bien.
AGD: Le président de l’assemblée a fait ce qu’on a fait d’habitude là. C’est-à-dire rien. (ah, ah, ah, ah, ah. On parle des réunions stériles et on essaie de convaincre les gens du cœur uni. Car, c’est la première fois dans l’histoire du pays qu’on voit les députés qui ont autant peur, alors que dans tous les pays du monde, c’est le législatif qui tient l’exécutif par l’inverse (…….). Dès que tu parles de la motion de censure là, tu les vois trembler sur la honte. Écoutez, moi, ne pas compter sur l’URCA. En ce moment où vous me prenez sur vos impressions. Faire de l’opposition, ce n’est pas pour que Touadéra tombe bas encore. On fait de l’opposition pour qu’il rectifie le tire. Et que c’est vous, quand on vous dit quelques choses, vous bloquez. On dit, vous bloquez, et voilà les conséquences, puisque personne ne vous respecte. On interpelle un ministre, il ne vient pas. On interpelle le gouvernement, il ne vient pas. Quand un ministre propose une loi, on le convoque pour les commissions, il ne vient pas. Et puis le gouvernement nous affame. Quand les commissions se réunissent là pour distribuer les projets de lois aux différentes commissions, ce sont les membres de commissions qui cotisent pour acheter des rames de papiers.
JK: ah bon?
AGD: C’est du jamais vu!
JK: Donc le budget ne leur est pas soumis? (…….)
AGD : Non, non, (…..). On m’a dit que quand Lagarde était arrivée, elle a voulu parler à l’Assemblée nationale. Naturellement, c’est le Ministre des Finances qui l’accompagne. Apparemment, elle a demandé à parler, et le PAN a dit que non, c’est elle qui était invitée, c’est elle qui doit parler. Toi, tu a été Ministre d’un gouvernement. C’est quand on t’interpelle que tu dois parler. Il y’a des règles qui existent pour les prises de paroles, y compris du Président de la République au niveau du parlement. Depuis là, il a décidé de montrer de quel bois il s’échauffe.
JK: Lui le Ministre des Finances?
AGD: encouragé par Touadéra évidemment.
JK: (……)
AGD: ils doivent des indemnités aux Députés. A chacun, ils doivent les cinq (5) mois-là que nous…,
JK: Et là, ça risque de bloquer le pays.
AGD : Bref, on va discuter de ça cette (…). Mais un Président, quand tu rends visite officielle dans un pays, ça c’est réglementé depuis la nuit des temps. Tu ne restes pas dix jours chez quelqu’un !!!! …. Tu es un chef d’Etat, tu restes 48 heures, mais le pays va tomber. Ce n’est pas possible. Sur la situation du pays, il n’a même pas appelé sur la Radio Centrafrique pour dire sa compassion aux victimes de Bangassou, d’Alindao, de Bria. Ici, le Premier ministre ne dit rien. On est là. La population de Bangassou, de Rafai, elles sont inquiètes et personne pour réagir. Vous le connaissez, parce que vous avez travaillé ensemble. Mais moi, je le découvre maintenant.
JK: je pense que vous avez tout dit, Président. Je pense, cette affaire, c’est une question de courage et de détermination. Si les gens sont courageux et déterminants, je pense qu’à partir de ce moment là, les gens peuvent prendre une décision ferme pour faire sortir notre pays là de cette situation actuelle. Moi, c’est comme ça que je vois les choses depuis longtemps et les députés aussi au niveau de l’assemblée nationale. Je pense que beaucoup ne savent pas pourquoi ils sont là-bas. Certains sont allés pour protéger leurs affaires, d’autres pour nuire. Je pense que c’est une question de responsabilité. Maintenant, vous venez de vous rendre compte par rapport à ce dossier, à cette situation qui inquiète tout le monde. Tout le monde est inquiet par rapport à cette situation actuelle là. Dans le pays, le FRPC fait ce qui lui semble bon. L’UPC fait ce qui lui semble bon. Et anti-balaka de Mokom fait ce qui lui semble bon et les gens sont là en train de regarder. Je pense qu’à un moment donné, il suffit seulement de prendre des décisions. A des situations pareilles, vous allez dire par exemple, que je vous soutiens dans telles manœuvres données et c’est tout. Mais à un moment donné, je pense que la décision est importante pour changer les choses. La décision c’est quoi? On les laisse continuer ou on arrête avec eux. C’est tout simplement ça. Mais si on les laisse continuer, on va les laisser continuer! Si on doit arrêter avec lui, on arrête avec lui. A quand prendrons notre responsabilité??? C’est-à-dire, c’est un travail qui va être fait d’une manière minutieuse avec beaucoup de tacts pour éviter des erreurs. Parce que dans cette situation, il ne faut pas qu’il y’ait de ratée. Moi, c’est comme ça que je vois les choses.
AGD: Et comment vous voyez ça?
JK: Nous, nous avons fait ça pendant la transition. Nous avons bloqué le pays au moins pendant deux semaines. La seule erreur est que nous avons demandé à ce qu’il n’y ait pas des crépitements d’armes. Et un jour où nous devons pratiquement réussir ce coup, les Andjilo et autres ont utilisé les armes. C’est à ce moment-là que la Minusca est obligée d’intervenir. Puisque c’était bien fait et préparé pour que la Minusca et Sangaris n’empêchent pas ceux qui tiennent à paralyser le pays.
AGD: Ces gens étaient d’accord avec vous? (Rire des deux). Mais la Sangaris n’est plus là et moi je pensais que…….. Et quel était l’état d’esprit des autorités?
JK: Moi je pense qu’eux-mêmes sont là et ils nous suivent. Les Occidentaux nous suivent, ils nous regardent. Eux-mêmes ils disent qu’ils nous ont parlé en vain, et enfin nous avons voulu faire le surplace. Etant donné que nous même ne bougeons pas, mais les Occidentaux ne vont pas bouger aussi. C’est à nous de leur faire la proposition concrète. Nous, nous avons fait cette proposition concrète et cela a marché. Et avec l’arrivée du nouveau Président (EmmanuelMacron), je sais qu’il serait quand même là avec le gouvernement et il serait au courant de ce qui serait passé. Parce que cette affaire a été travaillée aussi avec Le Drian. Si nous voulons le faire, nous faisons un déplacement rapide là-bas. Si vous le voulez, nous pourrons évidement faire un tour là-bas. Et nous allons les voir. Et après un retour sur Djaména, Brazzaville, ici, un tour à l’intérieur du pays. (….) parce que je sais qu’ils en ont. Il y’a un mois, j’ai échangé avec eux, ils ont dit mais, vous faites des annonces, mais vous ne faites rien et puis là par exemple, nous sommes là, Nouradine prend le temps de se réarmer, Ali Darrassa pareil.
AGD: Mais ces gens-là, qu’est-ce qu’ils projettent de faire?
JK: Qui ça?
AGD: Ceux que vous venez de citer là. Quel est leur plan d’actions?
JK: De Nourredine?
AGD: Oui.
JK: Eux, c’est seulement l’amnistie. Leur problème est de tout faire pour qu’il y’ait l’amnistie. Que ça soit de l’autre côté, ils veulent qu’il y’ait coût que coût de l’amnistie. Parce que, s’il n’y a pas l’amnistie, ils iront en prison. Voilà pourquoi, tout ce que nous sommes en train de faire, pour le peu que nous sommes en train d’avoir avec tout ce monde-là, c’est le problème de l’amnistie. Parce qu’ils ne veulent pas entendre parler de l’amnistie. Et le Tchad est pour l’amnistie alors qu’ici à Bangui, les Centrafricains dans la grande majorité ne veulent pas en entendre parler de l’amnistie et les Européens, plus particulièrement la France ne veut pas entendre parler de l’amnistie. Voilà le problème. Pour un travail bien fait, nous aurons la situation.
AGD: Et quels seront les acteurs?
JK: Les acteurs sont là. C’est-à-dire que les acteurs, ce ne sont pas seulement ceux qui se battent là-bas. Dans la séléka, il y’a des gens par exemple…, nous pouvons travailler avec l’UPC. Nous pouvons travailler avec une partie du FPRC de Nouradine Adam et avec les anti-balaka. Ça, ce sont les acteurs. Bloqué l’intérieur, bloqué Bangui avec la complicité des Européens surtout de la France d’abord qui parle à la Minusca de rester calme. Et il suffit d’aller à Djaména pour appeler Nourredine de venir voir ou il envoie les gens de là-bas…, et il va se taire. Parce que dans un premier temps, il faudrait lui faire comprendre qu’il y’aura de l’amnistie. Là, il va se taire. Et après maintenant, puisque les autres Occidentaux ne voulant jamais entendre parler de l’amnistie, il faut sanctionner. Dès que nous aurons mis un pouvoir en place avec l’autorité de l’Etat, nous commencerons à sanctionner comme nous l’avions fait à Brazzaville. Vous étiez à Brazzaville quand le Président Sassou avec le général…, commençaient à traquer tous les hors-la-loi et après, quand un, deux ou trois hors-la-loi ou chefs de guerre tombent, les autres finiront par changer de comportement pour dire qu’ils allaient être du côté de la légalité et puis c’est tout. Rien que ça. Demander l’amnistie qui n’est pas négociable du tout. Parce qu’il y a eu beaucoup de mort etc. Les gens ont souffert. Si nous n’agissons pas maintenant, et si nous voulons accompagner le président les yeux fermés. Vous savez ce que c’est que les yeux fermés. Même un aveugle se fait guider. Parce que si chaque Centrafricain peut aller et venir, aller au KM5 et revenir (…), si des gens comme Nourredine et Ndarass savent qu’ils ne peuvent pas être coincés, mais dans 2 ou 3 ans, ils voudront le pouvoir. Alors, que devons-nous faire? Nous devons le faire au moment où la ville de Bangui est encore très calme. Pas de coup de feu, les gens vont se désarmer à chaque étape par étape comme je venais de le dire tout à l’heure. Parce que l’Occident aujourd’hui est en difficulté, en particulier la France. Dans un sens litéral, c’est le moment opportun. Parce qu’avec le nouveau président, c’est déjà une perche. Donc, s’il y’a cette perche, nous venons récupérer les choses en Centrafrique sinon, il n’y a que le Mali. Donc la stratégie que nous devrons mettre en place, c’est…, pas de crépitement d’armes.
AGD: Pour cela, quels sont nos interlocuteurs? Le premier entretien, c’est celui que j’ai eu avec vous maintenant. Ensuite, nous allons poursuivre avec d’autres interlocuteurs. Je ne connais pas trop le Président (de la République). Mais j’ai l’impression comme s’il est devant une situation très compliquée.
JK : Ce n’est pas lui, les gens l’ont attaqué. Jusque-là, les gens continuent de courir dans tous les sens. Normalement, lorsqu’il n’y a pas de solution au bout de cinq premiers mois, si les gens résistent, il suffit de les mobiliser et les sensibiliser. Donc, il faut les moyens pour que les gens puissent accepter. La chute, c’est de faire dérober la mission.
AGD: Il faut savoir que, ce qui se passe à l’Assemblée nationale, pour que le gouvernement passe dans la déstabilisation, je pense, sans me tromper, que l’Assemblée nationale prochaine soit ce qu’il faudrait. Tout le monde est mieux pour cela. Car, les spectateurs commencent déjà. Ceux qui se lient dans les petits calculs-là, même les gens des Cœur uni, ils sont terrorisés dans cette situation. Donc, cette crise au niveau du gouvernement, notamment de vouloir dissoudre l’Assemblée, ils ont fait des bêtises. Qui sera incapable de trouver un Premier ministre? Mêmes les gens de l’opposition sont en pleine cohabitation. Donc, il faut que les conditions soient créées à seul.
JK: Moi, je pense qu’au sein de l’opposition, les noms de Tiangaye, Mboli-Goumba…
AGD: Ce n’est pas grave! Je n’ai pas le titre foncier de l’opposition. J’étais là depuis un an, et j’ai dit, pas de Plateforme de l’opposition. On n’en a pas besoin. Le Centrafricain n’est excellent que pour faire son solo. On voit que tout le monde est unanime que le gouvernement paralyse le pays. Donc, le gouvernement de Sarandji-là, on va le faire tomber. Depuis quelques jours, nous avons fait deux concertations: une pour les Députés, et une autre ce matin avec ce qu’on appelle la conférence des pays. C’est la conclusion naturelle que tout le monde a retenue. Toutefois, je leur ai dit que tout cela doit se faire sans moi. Mais tous ont dit que c’est vous que la population regarde, disant que c’est vous qu’elle a élu. Il faut prendre vos responsabilités. Bon, je suis là. Je suis en train de voir qui est qui, s’il y a un courageux qui veut écrire le premier papier.
JK: Ça, c’est bien. Chaque jour, j’en rencontre certains qui me disent la même chose. Maintenant pour canaliser ça, nous ne pouvons pas en parler… puisque vous devenez un peu sombre, ou que vous n’êtes pas la personnalité. Ce sera à l’avantage du PAN.
AGD : Bon, ça, à la prochaine rencontre, on peut en parler. Hein?
JK: D’accord! J’attends donc ce moment-là pour que nous commencions à nous organiser, à prendre des contacts nécessaires.
ADG : Je crois la semaine prochaine. Je viserai deux choses: la France et l’Assemblée nationale. Une fois après, nous pouvons nous nous voir.
JK: D’accord!
ADG: Maintenant, je crois que je vous ai pris beaucoup sur votre agenda… Je vous remercie, Monsieur le Ministre ».
Dossier à suivre…