RCA: bébés prématurés, mieux prévenir le phénomène et améliorer la prise en charge

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Prise en charge des enfants prématurés par le MSF à Bangui

Par MSF

Bangui 11 décembre 2024—(Ndjoni Sango) : Dans le monde, environ 1 bébé sur 10 nait de façon prématurée, c’est-à-dire avant 37 semaines de grossesse. Si le phénomène n’est pas rare, il peut entraîner des conséquences néfastes – voire fatales – pour le nouveau-né.

« Les complications liées à la prématurité sont la première cause de mortalité chez les nouveau-nés dans le monde », explique le Dr Bintou Deme, référente médicale de Médecins Sans Frontières (MSF) à Bangui. « La mortalité est particulièrement élevée en République centrafricaine. Les consultations durant la grossesse sont encore trop rares alors qu’elles permettraient de détecter une partie des risques. Et les soins pour les prématurés restent largement insuffisants Or, les trois quarts des décès pourraient être évités grâce à un suivi régulier des grossesses et à des interventions courantes qui ne nécessitent pas de technologies avancées. »

Des soins

Pour réduire les risques de mortalité à travers le pays, les équipes de MSF collaborent avec le ministère de la Santé et de la Population (MSP) afin d’améliorer l’offre de soins maternels et infantiles. A Bangui, cette collaboration se déroule notamment au Centre Hospitalier Universitaire Communautaire de Bangui (CHUC) – généralement connu comme « Hôpital Communautaire ».

En 2022, MSF y a construit et équipé une unité de prise en charge des grossesses à risque, ainsi qu’une unité néonatologie de 43 lits pour les nouveau-nés ayant des complications de santé, y compris la prise en charge des prématurés. De janvier à mi-novembre 2024, plus de 3.100 bébés prématurés ont été traités avec le soutien de MSF dans cette unité spécialisée, la seule à Bangui à offrir gratuitement des soins aussi avancés.

C’est ici que Jeanisse Ngaïdama, 23 ans, a donné naissance à des jumeaux prématurés le 11 octobre.

« Je ne savais pas qu’un tel service existait », explique-t-elle. « Mettre au monde des enfants prématurés est stressant. J’avais très peur. Je savais qu’il faudrait des professionnels qualifiés pour sauver mes bébés, et je pensais déjà aux dépenses qui m’attendaient. Mais ici, je n’ai pas dû payer. Le personnel vient régulièrement voir mes bébés et tous les soins sont gratuits. Grâce aux soins, ils ont atteint un poids normal. »

Comme les autres mères de cette unité, Jeanisse pratique avec ses bébés la « méthode Kangourou » : de jour comme de nuit, les nouveau-nés prématurés sont portés par leurs mamans sur leur poitrine nue et nourris uniquement au sein. Le contact de peau à peau les réchauffe, et contribue à un développement optimal sur les plans social, affectif et cognitif. Les études ont démontré que l’approche Kangourou améliore les chances de survie des prématurés tout en étant peu coûteuse.

« La méthode Kangourou a beaucoup d’avantages car elle permet dans un premier temps de réguler la respiration, le battement de cœur et la température de l´enfant », explique le docteur Josiane Damangoa, pédiatre du ministère de la santé et de la population au CHUC. « Elle améliore la circulation de l’oxygène, aide à calmer le bébé, favorise le développement du cerveau et renforce son système immunitaire. »

L’urgence de renforcer l’offre de soins en RCA

Réduire les décès évitables des nouveau-nés et des enfants de moins de 5 ans est l’une des cibles des Objectifs de Développement Durable (ODD) que l’ensemble des pays du monde se sont engagés à atteindre à l’orée 2030.

En RCA, où les taux de mortalité maternelle et infantile restent parmi les plus élevés au monde, parvenir à ce résultat nécessite d’améliorer au plus vite les conditions de prise en charge des femmes au cours de leur grossesse, de l’accouchement et après celui-ci, ainsi que des nouveau-nés, en particulier ceux nés prématurément et malades.

« L’Organisation Mondiale de la Santé estime qu’une femme devrait bénéficier d’au moins 8 consultations prénatales au cours de la grossesse », explique le Dr Bintou Deme, de MSF.

« Malheureusement, nous en sommes encore loin en RCA », poursuit-elle. Le manque de structures de soins disponibles et fonctionnelles, les coûts liés aux transports et aux soins sont autant d’obstacles à surmonter – encore plus en dehors de Bangui. Renforcer la sensibilisation des futures mamans est aussi nécessaire. Plusieurs causes de prématurité sont détectables lors de ces consultations : maladies chroniques, infections, grossesses précoces ou rapprochées, les travaux durs aux champs, le manque de repos… »

Outre le renforcement du suivi prénatal, investir dans une meilleure prise en charge des prématurés – y compris par des techniques efficaces et peu coûteuses comme l’initiation précoce à l’allaitement maternel exclusif et les soins kangourous – s’impose également. MSF, dans sa collaboration avec le ministère de la Santé et de la Population, en a fait une priorité. Mais davantage de mobilisation s’impose pour offrir aux futures générations centrafricaines de meilleures chances de bien grandir et se développer.

Chaque année, le 17 novembre marque la ‘Journée Internationale de la Prématurité’, journée permettant de mettre en lumière cette problématique de santé publique, mobiliser les énergies pour améliorer la prise en charge et la prévention, encourager les femmes à suivre les consultations prénatales et mettre à l’honneur les bébés nés prématurément et leurs familles.