Par Mamadou NGAINAM
Bangui 10 novembre 2025 — Alors que la campagne présidentielle bat son plein en République centrafricaine, une affaire à portée juridique et politique majeure menace de bouleverser la course à la magistrature suprême. L’ancien Premier ministre Marie-Henri Dondra se retrouve au cœur d’une controverse sur sa double nationalité, une situation qui pourrait rendre sa candidature inéligible et exposer l’homme politique à des poursuites judiciaires.
Selon plusieurs sources concordantes, Marie-Henri Dondra aurait conservé un passeport congolais valide jusqu’en 2026, tout en exerçant des fonctions publiques de premier plan en Centrafrique, dont député, ministre des Finances, puis Premier ministre.
Or, le code de la nationalité centrafricaine de 1961 est explicite. Son article 46 stipule que « tout Centrafricain majeur acquérant volontairement une nationalité étrangère perd la nationalité centrafricaine ».
De plus, l’article 50 prévoit la déchéance de nationalité si une personne « se comporte en fait comme le national d’un pays étranger ».
Ainsi, le fait pour Dondra d’avoir exercé des fonctions officielles sans renoncer à sa nationalité congolaise constituerait une violation grave de la loi. Les faits pourraient également relever du délit d’usurpation de fonctions publiques et de l’usage de faux documents administratifs.
Le problème dépasse les frontières centrafricaines. En République démocratique du Congo (RDC), la Constitution de 2006 et le code de la nationalité de 1972 interdisent formellement la double nationalité.
L’article 19 du code congolais stipule en effet que « quiconque acquiert volontairement une nationalité étrangère perd la nationalité congolaise ».
Ainsi, en conservant sa nationalité centrafricaine sans y renoncer officiellement, Marie-Henri Dondra aurait également contrevenu à la législation congolaise.
Cette affaire rappelle le précédent d’Anicet-Georges Dologuélé, autre ancien Premier ministre, qui a été déchu de sa nationalité centrafricaine en 2025 pour avoir acquis la nationalité française. Cette décision du tribunal centrafricain a marqué un tournant juridique et pourrait servir de base à une décision similaire concernant M. Dondra.
Selon la Constitution centrafricaine de 2023, tout candidat à la présidence doit être « centrafricain d’origine » et n’avoir jamais possédé une autre nationalité, sauf s’il y a formellement renoncé avant le dépôt de sa candidature.
Or, même si Marie-Henri Dondra a présenté, en juillet 2024, une déclaration de renonciation à la nationalité congolaise, cette démarche pourrait ne pas suffire, la Constitution exclut tout candidat ayant déjà détenu une autre nationalité.
Le Conseil constitutionnel devra donc trancher sur la validité de sa candidature, un verdict qui pourrait profondément influencer l’issue de la présidentielle.
Au-delà des aspects juridiques, cette affaire soulève des questions essentielles sur l’intégrité des dirigeants et la crédibilité des institutions. Dans un contexte où la population aspire à une gouvernance exemplaire, beaucoup estiment que nul n’est au-dessus de la loi, pas même ceux qui ambitionnent de diriger l’État.
« L’élection présidentielle doit être le symbole de la transparence et du respect des lois. Les Centrafricains méritent des candidats irréprochables, dont la légitimité ne soit pas entachée par des zones d’ombre », confie un juriste proche du dossier.
Alors que les principaux partis politiques affûtent leurs stratégies, la situation de Marie-Henri Dondra pourrait redessiner le paysage électoral. Entre enjeux juridiques, débats éthiques et rivalités politiques, la présidentielle de 2025 s’annonce comme l’une des plus scrutées de l’histoire récente de la République centrafricaine.








































