Présidentielle de 2025 en RCA: la stratégie paradoxale d’Anicet Georges Dologuélé interroge

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Anicet Georges Dologuelé, opposant politique et président de l'Union pour le Renouveau Centrafricain @crédit photo Erick Ngaba

Par Juste MBANGO

Bangui 17 décembre 2025—(Ndjoni Sango) : À moins de deux semaines de l’élection présidentielle du 28 décembre 2025, la démarche ambiguë d’Anicet Georges Dologuélé suscite de nombreuses interrogations sur la scène politique centrafricaine.

Le candidat de l’URCA a saisi l’Autorité nationale des élections (ANE) et le Conseil constitutionnel pour demander l’annulation du scrutin, alors même qu’il a officiellement déposé sa candidature et engagé sa campagne électorale, une posture qui nourrit le débat sur la cohérence stratégique de ce leader d’opposition en perte de repère avec sa base.

L’on voit dans ses manœuvres dilatoires une initiative qui s’inscrit dans une stratégie dite de contestations préventives, souvent observée dans les contextes électoraux tendus. Elle consiste à participer au processus tout en le remettant en cause, afin de préparer le terrain à une éventuelle contestation des résultats, en cas d’issue défavorable.

Cette démarche vise également à exercer une pression politique et médiatique sur les institutions en charge des élections. Toutefois, elle comporte un risque d’affaiblir la crédibilité du candidat lui-même, en donnant l’impression d’un rejet des règles du jeu qu’il a pourtant acceptées. D’ailleurs, il a même refusé délibérément de signer le code de bonne conduite dont tous les candidats à la présidentielle ont cette obligation de signer.

Sur le plan politique, la situation apparaît paradoxale. Comment expliquer à l’électorat que l’on sollicite le suffrage des citoyens tout en appelant à l’annulation du scrutin censé consacrer ce choix démocratique ?

Cette contradiction alimente le sentiment d’un manque de clarté stratégique, voire d’une ligne politique hésitante, difficile à défendre sur le terrain. Cela peut aussi justifier le poids du rapport de force électoral observé sur le terrain de la campagne, où on voit de moins en moins son impact.

Dans le même temps, le contexte électoral est marqué par une forte présence du président sortant, Faustin Archange Touadéra. Les mobilisations populaires observées lors de ses déplacements et le soutien affiché de plusieurs forces politiques et sociales renforcent l’idée d’un rapport de force favorable au chef de l’État, par ailleurs candidat du MCU.

Dans ce cadre, certains observateurs estiment que la démarche de Dologuélé pourrait traduire la crainte d’une défaite, possiblement dès le premier tour, et la volonté de déplacer le débat du terrain électoral vers celui des institutions judiciaires et administratives. Or, c’est un pari risqué face à une opinion en quête de stabilité.

À l’approche du scrutin, une grande partie de la population, notamment la jeunesse, exprime une attente forte en matière de stabilité, de paix et de lisibilité politique. Une contestation jugée prématurée ou excessive pourrait être perçue comme une incapacité à assumer une compétition électorale dans le respect des règles établies.

À quelques jours du vote, la stratégie d’Anicet Georges Dologuélé reste donc un pari politique risqué, qui pourrait autant mobiliser ses partisans que renforcer le scepticisme d’une frange importante de l’électorat.

Demander le report de ces élections affiche une volonté claire du candidat Dologuelé à provoquer un autre chaos en République centrafricaine, une manœuvre politique de déstabilisation dont les Centrafricains et la communauté internationale ne sont pas prêts à accepter.

Dans tous les cas, l’issue de cette présidentielle reposera sur les urnes et sur la capacité des candidats à convaincre les Centrafricains de la pertinence de leur projet de société, dans un contexte où la maturité démocratique du pays est plus que jamais mise à l’épreuve.