RCA : « Le phénomène de baisse de niveau date des années 80 » Aboubakar Moukadas Nour, ministre de l’éducation

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Moukadas Nour, Ministre de l'éducation nationale@photo Erick Ngaba

ECLUSIVITE

Moukadas Nour, Ministre de l’éducation nationale @photo Erick Ngaba

Interview exclusive
Bangui 3 février 2020—(Ndjoni Sango) : Le samedi 1er février dernier est gravé dans les annales de la République centrafricaine avec la tenue de la table-ronde relative au renforcement du système éducatif centrafricain initiée par l’ONG nationale dénommée «Kodé ti Inga Ndo», en collaboration avec le ministère de l’Education nationale. Ceci en prélude au 1er anniversaire de la signature de l’Accord Politique pour la Paix et la Réconciliation en RCA (APPR-RCA) du 6 février 2019. Les cérémonies y relatives se sont déroulées en présence du ministre d’Etat, Conseiller à la présidence de la République, Simplice Mathieu Sarandji, du Conseiller spécial du président de la République, chargé de la sécurité nationale et du ministre de tutelle, Aboubakar Moukadas Nour et de plusieurs invités de marque. En marge de cette table-ronde, le ministre de l’Education nationale a jugé utile d’accorder une interview à la Radio Lengo Songo pour exprimer sa satisfaction suite à la tenue avec succès de cette table-ronde autour du thème «La route de l’école, la route de la paix». Très satisfait de la tenue de cette table-ronde, le ministre de l’enseignement primaire et secondaire répond aux questions de Ndjoni Sango.
Monsieur Aboubakar Moukadas Nour, bonjour,
Vous êtes le ministre de l’Enseignement Supérieur. Aujourd’hui, l’ONG nationale dénommée «Kodé ti Inga Ndo» en collaboration avec votre département a organisé une table-ronde dont vous avez suivi de bout en bout les discussions jusqu’à la fin. Quelle est votre première réaction ?
Aboubakar Moukadas Nour: Ma toute première réaction, c’est une grande satisfaction, une grande joie d’avoir participé de bout en bout, c’est-à-dire, du début jusqu’à la fin cette assise qui a regroupé les acteurs du système éducatif de notre pays à travers un thème générique qui est «Retour à l’école, retour à la paix».
Tout cela sur initiative de l’ONG «Kodé ti Inga Ndo». Ce que j’apprécie énormément ! Car, au tour de cette thématique centrale «Retour à l’école, retour à la paix», c’est un sujet qui est très préoccupant pour le système éducatif de notre pays.
Et cela dans les perspectives d’une journée qui sera organisée, j’en suis sûr, autour de l’Accord de Paix et de Réconciliation en RCA. Parce que c’est en perspective de cette journée là que l’ONG dénommée «Kodé Ti Inga Ndo» a anticipé pour convier tous les partenaires du système éducatif centrafricain afin d’y réfléchir. Parce que le chemin de la paix passe forcément par l’école, donc par la formation, par l’encadrement de nos jeunes, pour ne pas les laisser à la merci des aventuriers, pour ne pas les laisser à la merci des démagogues.
Si nos citoyens sont informés, si nos citoyens sont formés, si nos citoyens sont encadrés, nous ne pouvons pas prêter franc à ces genres de discours de démagogie. C’est pourquoi j’apprécie franchement cette initiative, de réunir tous les acteurs du système éducatif pour partager ces idéo. Qui est mieux placé pour informer la jeunesse, si ce ne sont pas les enseignants ?
A travers les acteurs du système éducatif centrafricain, si chacun joue bien sa partition, on pourra avoir gain de cause concernant la consolidation de l’Accord Politique pour la Paix et de Réconciliation, qui a été paraphé à Khartoum et signé à Bangui le 6 février 2019.
Aux termes des débats, les experts ont relevé aussi comme aspect, la responsabilité de certains cadres du ministère de l’Education nationale dans le pourrissement du système éducatif centrafricain. Comment réagissez-vous à cela ?
Aboubakar Moukadas Nour: Oui, on ne va pas se dérober de ce phénomène. Il faut être responsable ! Mais, il faut reconnaître que le phénomène de la baisse de niveau ne date pas d’aujourd’hui. Le phénomène de la baisse de niveau est partie de la politique que le gouvernement de notre pays avait mis en pratique dans les années 79 et 80.
Vous vous souvenez de PDVA (Départ Volontaire à la Retraite). Et c’est à l’issu justement de ce programme-là où tous nos meilleurs enseignants qui ont pris ce DVA sont partis à la retraite. Et ceux qui n’ont pas pris le DVA, sont atteints par la limite d’âge et sont tous partis à la retraite.
Donc, il fallait les remplacer. Ce n’est pas une tâche facile ! Imaginez, au bout d’une ou deux années, tous nos meilleurs enseignants ont pris le DVA et sont allés à la retraite. Dans ce cas, comment les remplacer ? On n’en parle pas. Mais, au fait, le phénomène de la baisse de niveau est partie de là et ajouté à cela les crises militaro-politiques et des années blanches que le système éducatif a connu.
Mais aujourd’hui, nous ne baissons pas les bras. Pour vraiment améliorer la qualité de l’éducation dans notre pays, il faut forcément passer par la formation des formateurs. C’est cette solution qui va permettre de relever le phénomène de la baisse de niveau. C’est-à-dire, former des enseignants, ceux qui sont des puristes et des enseignants chevronnés. C’est à travers la formation, il n’y aura pas d’autres solutions. Heureusement, certains de nos partenaires ont compris ce souci et qui nous aide dans ce sens en formant nos formateurs, quitte à eux maintenant de venir former leurs compatriotes.
Donc, le relèvement de notre système éducatif ne peut que passer par la formation des formateurs. On a beau investir dans des infrastructures, on a beau investir dans des équipements, on beau investir dans des mobiliers. Mais si on n’investit pas dans la formation des formateurs et surtout de qualité concernant nos enseignants, en tout cas, on n’allait pas sortir de cette situation.
Monsieur le Ministre, après la tenue de cette table-ronde, vous avez un message à lancer à l’endroit de certains cadres du ministère de l’Education nationale qui jouent au pourrissement du système éducatif centrafricain ?
Aboubakar Moukadas Nour: Vous savez, moi je ne juge jamais les enseignants. Je ne jette jamais de l’opprobre aux enseignants. Moi-même je suis enseignant, je sais ce que cela veut dire. Nous on a choisi ce métier par vocation. On n’est pas venu pour tirer profit de certaines situations. On a toujours formé, on a toujours enseigné. C’est un métier qui est noble, et nous sommes fiers d’exercer ce métier-là. Bien entendu, il y a d’autres qui pensent qu’à travers ce métier ils vont tirer les draps de leurs côtés à travers l’enrichissement, je leur dit qu’ils font fausse route.
Je suis bien placer de les dire que c’est une vocation. On l’a choisi ou on l’a choisi pas ! Donc, on ne vient pas enseignement pour s’enrichir, mais plutôt, on peut s’enrichir intellectuellement. Même les élèves que nous formons, ce sont des richesses. C’est nous qui ne les savons pas. Ce sont des richesses que beaucoup ne le savent pas malheureusement!
Monsieur le Ministre, je vous remercie!
Interview réalisée par Saint-Cyr Gbégbé-NGAÏNA pour Ndjoni Sango

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